Éloi Kiroffo, boxeur au grand cœur
7/09/2016 |
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Natif de Madagascar, il a vécu plusieurs vies. Fin des années 80, Eloi était le boxeur emblématique de la région dinannaise. Depuis il a connu bien d'autres aventures.
« Tout mon parcours est une histoire de chance. Il faut savoir remercier la nature et savoir rendre ce que l’on a reçu. » Homme bon et croyant, Eloi sait d’où il vient et ce qu’il a vécu. Sa gentillesse n’a d’égale que sa bonté. Mais comment pourrait-il en être autrement pour celui qui est né un 25 décembre de l’année 1963 ? 8e enfant et 4e garçon d’une fratrie de 12 enfants, d’une mère malgache et d’un père cultivateur corse, Eloi était donc Franco-Malgache. Mais dans les années 70, il a fallu choisir : la famille décide de prendre la nationalité française et Eloi arrive avec ses parents en France à la fin 1979.
« Le dépaysement est total, je venais de l’île Sainte-Marie, à côté de Madagascar. Le débarquement à Orly a été un choc. Nous avons vécu quelques mois à Sarcelles avant de partir pour Mulhouse. À l’époque, j’étais trop jeune pour travailler et trop vieux pour étudier. Je tournais donc en rond. »
Culturisme déconseillé
La famille déménage de nouveau pour Avignon. Éloi déjà bien musclé allait voir les culturistes, mais son médecin lui déconseille de s’adonner à cette discipline. Un des frères d’Eloi habite alors Dinan. Début 1981, Eloi le rejoint et travaille dans une carrière. Il s’essaye à la boxe et fait son premier combat en super-welters, puis est appelé sous les drapeaux. Il effectue son service militaire à Montauban-de-Bretagne au sein du 17e RGP (régiment du génie parachutiste). Après l’armée, Eloi reprend la boxe en amateur puis passe chez les professionnels.
Jamais au tapis
Dès 1981 en amateur, Eloi Kiroffo est champion de Bretagne en Welters, puis maigrit et passe successivement en léger, super-léger, super-plume et coq, tout en continuant à être le porte-drapeau de la Bretagne. En 1985, il passe professionnel et le restera jusqu’en 1990. Au cours de cette période, il rencontrera, entre autres, Hervé Jacob, futur champion d’Europe des plumes, pour qui ce sera, d’ailleurs, le premier combat pro. Au sein du club de Quévert, Eloi est alors le seul pro.
« Je n’ai
jamais
cherché à mettre KO. »
« Denis Riffard était mon manager. C’est vrai qu’à l’époque, j’étais un peu la vedette, mais je ne pouvais vivre de la boxe. » Droitier, très souple, pratiquant l’esquive, Eloi avoue : « Je n’ai jamais cherché à mettre KO. » Un comble pour un boxeur, mais qui s’explique par le gros cœur de cet enfant de Madagascar. « En vieillissant, la conscience humaine se fait de plus en plus jour, on mûrit, on comprend des choses. Un soir, je regarde le championnat du monde des poids coq. Un des deux boxeurs, un Mexicain, ira au tapis et ne se réveillera jamais. Je me suis alors dit que je n’étais pas invincible. Marié en 1984, j’étais papa de trois enfants. J’ai décidé d’arrêter. La vraie richesse est la santé. »
Les carrières
Éloi suit alors une formation en peinture, travaille en intérim, puis est engagé aux carrières de granit André à Languédias où il construira sa maison plus tard. En juin 1993, il a un CDI. Très motivé, il passe l’examen d’artificier. « Je suis tombé sur un chef, Jean Gélard, qui m’a appris le métier d’extracteur. »
En 2002, Eloi est rembauché aux carrières Gicquel, mais le granit va de plus en plus mal. En 2010, c’est la fin. Très courageux, se refusant à se laisser vivre, Eloi va travailler chez Chaux et Compagnie à Plélan-le-Petit en faisant de la maçonnerie à l’ancienne. Quatre ans plus tard, il est licencié. Retour à la carrière, mais cette fois-ci à Brusvily pour un CDD de deux mois.
Pas de regret pour la boxe
En août 2015, la commune de Languédias l’embauche à plein-temps, puis depuis mai de cette année, il est également employé municipal à Saint-Maudez où il partage désormais son temps avec Languédias. « Je n’ai aucun regret de la vie passée. Les frères Acariés m’avaient contacté, mais comme je n’aime pas les grandes villes, je n’ai pas donné suite. J’ai découragé mes enfants de faire de la boxe. Ils sont costauds et ont fait du foot. Je crois que personnellement j’ai arrêté à temps, après avoir pris conscience des dangers et avoir eu peur. »
Fan de Marvin Hagler, Eloi Kiroffo a toujours un sac dans son garage : « Au début de mon divorce, cela m’a remis dans le bon sens, dans le droit chemin. Je faisais de la corde et du sac jusqu’à ne plus en pouvoir. » Éloi sait qu’il retournera un jour à Madagascar. Portant toujours la bonne parole, il souffle : « Ne fais pas à d’autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse. » Voilà peut-être pourquoi, il n’a jamais souhaité mettre KO ses adversaires.
Xavier BIZOT (CLP)
Source: http://www.le-petitbleu.fr