Omer Beriziky - « Je n'ai plus confiance en cette HCC »
19/01/2017 |
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Hery Rajaonarimampianina va fêter dans quelques jours ses 3 ans de pouvoir. « Son bilan est négatif. Et pour les 2 ans restants, je suis dubitatif. », affirme l'ancien PM Omer Beriziky.
La troisième année du mandat de l'actuel président de la République arrivera bientôt à son terme. Succès ou échec pour vous ?
« Le bilan est négatif. Le régime n'a pas trouvé de solutions aux problèmes socio-économiques rencontrés par la population dans leur vie quotidienne. Pour ne citer que la pauvreté extrême, l'insécurité, la corruption, l'impunité, la justice populaire, le délestage et j'en passe. Le régime n'a pas joué la transparence dans la gestion des grandes exploitations minières à Madagascar. Le pays a reculé sur tous les plans. Les dirigeants n'ont pas fait d'efforts alors que le président de la République avait promis monts et merveilles durant sa campagne électorale. Je viens de rentrer du Nord du pays. J'ai constaté que rien n'a été fait jusqu'à présent pour la réhabilitation de la route Ambilobe-Vohémar. Le président de la République l'a promis durant sa campagne et l'a réitéré à Iavoloha lors de la cérémonie de présentation de vœux du nouvel an. En ce moment, rien ne bouge. Nos dirigeants ont fait des efforts pour la répression des mouvements de contestation, certes, mais ils n'ont rien fait pour la lutte contre la pauvreté. Ils ont plutôt berné le peuple par des mensonges. »
Obtenir 10 milliards de dollars à Paris n'est-il pas un exploit ?
« Qu'est-ce que les Sommets internationaux (Comesa et Francophonie) et la Conférence des Bailleurs et des Investisseurs de Paris nous ont-ils apporté ? Jusqu'ici, il n'y a que des promesses. Les bailleurs de fonds ont leurs conditionnalités. Pouvons-nous remplir ces conditionnalités ? On connaît les conditionnalités des bailleurs, pour ne citer que l'Etat de droit, la bonne gouvernance, le respect des engagements pris et le respect des différents accords de partenariat qui font notamment les accords de protection des investissements. Aucun pays ne peut se développer sans le développement du secteur privé. Les bailleurs de fonds ne sont pas dupes. C'est pour dire qu'il n'y aura pas de miracles. Si les dirigeants veulent réellement sortir Madagascar de l'état où il se trouve actuellement, ils doivent oser prendre de grandes décisions et les exécuter. Et je peux affirmer que ces grandes décisions s'imposent, notamment dans le domaine social, et leur exécution s'avère urgente. »
Il y a ces derniers temps des tractations entre les anciens présidents de la République et l'actuel chef de l'Etat en vue de trouver éventuellement un terrain d'entente sur la formation d'un gouvernement d'union nationale. Est-ce une solution pour vous ?
« Le même schéma a été adopté durant la transition. Les politiciens se sont mis autour d'une table et ont contracté un accord politique qui a abouti à la mise en place d'un gouvernement de consensus. Qu'est-ce que cela a-t-il apporté pour notre pays ? Je ne dis pas qu'on n'a pas besoin de dialoguer. Pour moi, les accords politiques ou les alliances politiques ne peuvent pas résoudre les problèmes socio-économiques du pays. Prenons nos responsabilités et allons faire en sorte que le bien commun nous préoccupe tous. La réconciliation ne devrait pas être l'unique affaire de quelques politiciens. Elle doit être pour tous, une réconciliation sans hypocrisie. »
De nouvelles élections présidentielles auront lieu dans deux ans. Les conditions seraient-elles réunies pour ces rendez-vous électoraux ?
« Je suis complètement sidéré par la décision de la HCC sur l'opposition officielle à Madagascar. La Cour a bafoué la Constitution. Par ailleurs, je me souviens encore du fameux Pacte de responsabilité. Qu'en est-il actuellement? Je n'ai plus confiance en cette HCC. Son président qui était auparavant un juriste reconnu pour son intégrité et un membre respecté de la société civile, m'a particulièrement déçu. En ce qui concerne la CENI, sa démarche m'inquiète. Elle vient de remettre un paquet entre les mains du président de la République, mais le contenu dudit paquet reste un mystère pour le peuple. C'est pour dire que la démarche de la CENI manque de transparence. Revenant aux dernières Sénatoriales, la décision de la Commission électorale qui consistait à installer une urne par commune a été condamnable. Le secret du vote n'a pas été respecté. En 2018, Madagascar risque de connaître ce qui s'est passé en RDC où la présidentielle a été reportée au motif que les conditions n'étaient pas réunies. »
Sur ce point, avez-vous des messages à transmettre à la communauté internationale ?
« La communauté internationale doit surveiller de près les actions de la CENI. Quid de la révision de la liste électorale, des financements des partis, des financements des campagnes, et de l'égalité des chances des candidats ? Chose curieuse, Madagascar est un pays pauvre, mais pendant les campagnes électorales, de l'argent coule à flot sur le terrain. Il ne faut pas oublier que les crises politiques qui se sont succédé à Madagascar étaient des crises post-électorales.»
Source:Allafrica