Bois de rose de Madagascar: la société civile à cor et à cri pour préserver un hotspot de la biodiversité
9/03/2016 |
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Environ 2000 tonnes de bois de rose ont été signalés comme exportés illicitement durant les deux premiers mois de l’année 2015 (Société civile malagasy pour l'environnement)
Les cris d’alarme foisonnent de toute part à Madagascar et ailleurs pour mieux lutter contre le trafic de bois de rose, véritable « fléau écologique », alors que, de l’avis de la société civile et des acteurs internationaux, aucune avancée n’a été enregistrée à ce propos, depuis 2013, date du lancement par le gouvernement d’un plan de lutte.
Selon les estimations de la société civile malgache pour l'environnement (AVG), environ 2000 tonnes de bois de rose ont été signalés comme exportés illicitement durant les deux premiers mois de l’année 2015 et 4 autres bateaux ont embarqué avec des rondins de bois de rose au milieu de l'année.
Beaucoup d'autres transactions ont échappé au contrôle. Mais l’année 2014 est celle où le trafic a le plus fait rage. C’est à ce moment que 30 000 rondins ont été interceptés à Singapour, d’après les chiffres avancés par la Plateforme nationale de l’AVG.
Au terme de l’inventaire mené avec l’appui de la Banque Mondiale, 28 666 rondins de bois saisis ont été inventoriés tandis que 270 000 rondins ont été déclarés par les opérateurs. De son côté, le ministre de l’Environnement malgache, Ralava Beboarimisa affirme que « 27 725 bois ont été inventoriés dont 67% soumis à des marquages par code barre».
La région SAVA, située dans le Nord de Madagascar et la région Analanjirofo dans la partie Est avec trois districts, à savoir, Antalaha, Maroantsetra et Mananara Nord demeurent les points chauds du trafic de bois de rose, précieux en raison de sa senteur, couleur et texture. Ces bois sont exportés illicitement vers la Chine qui constitue la destination finale. Il arrive que les cargos transportant les bois de rose font escale dans d'autres pays comme le Singapour, le Kenya ou encore l'île Maurice.
Rassurant l'opinion publique, le ministre de l’Environnement malgache, Ralava Beboarimisa, a annoncé à la presse l'élaboration d’une chaîne spéciale de prévention. Toutefois cette dernière tarde à voir le jour.
L'organisation intergouvernementale Convention pour la protection des espèces menacées (Cites) a déjà fait connaître ses exigences, à l’issue d’une réunion de son comité permanent le 14 janvier. A travers un communiqué publié le 15 janvier dernier, la Cites exhorte Madagascar à mettre fin au commerce illicite de bois de rose et autres bois précieux d’ici Septembre. Elle met en place également un embargo sur le bois de rose au terme duquel les 181 pays membres de la Cites n’auront plus le droit d’importer du bois de rose de Madagascar jusqu'à nouvel ordre.
Un avertissement lancé à l’endroit des dirigeants malgaches qui sont appelés à l’application des sanctions contre les trafiquants, ainsi qu’à la réalisation de l’inventaire et la sécurisation des bois de rose saisis avec zéro mouvement dans tout le pays d’ici le 25 juillet prochain.
En réponse à cet ultimatum, le ministère de l’Environnement, de l’écologie, de la mer et des forêts a confirmé la mise en application de la loi n°013/2015 du 20 mai 2015 qui consiste à la mise en place d’un tribunal spécial destiné à juger les trafiquants de bois de rose.
«Le problème ne réside pas dans les lois mais leur application. Sans application des textes il est difficile de mettre fin au trafic», déplore Ndranto Razakamanarina, président national de l’Alliance Voahary Gasy (AVG). Cette plateforme de la société civile rassemble 28 organisations non gouvernementales et livre un combat contre le trafic de bois de rose et pour la mise en place d’une bonne gouvernance environnementale depuis l’année 2009 avec l’appui de bailleurs de fonds internationaux comme la Coopération Allemande.
Grâce à un système de veille informationnelle, l’AVG est au courant de tous les cas d’exportations illicites. «Il y a deux semaines, deux autres bateaux ont quitté nos frontières avec des bois de rose à leur bord », révèle le président de l’AVG.
S’associant à la société civile, le Syndicat des Corps Forestiers de l'Administration Forestière (Scofafor) mène aussi son propre combat. «Certes, nous sommes des fonctionnaires de l’Etat, mais nous somme aussi et avant tout des membres de syndicat. Donc nous pouvons nous ériger en balises contre les abus de l’Etat », déclare Rakotonirina Joseph Aimé, président du Scofafor.
Par le terme « abus », il désigne notamment l’interventionnisme de certains conseillers de la présidence auprès des responsables de l’administration qui tentent de faire appliquer la loi. Parmi ses armes, ce syndicat use souvent de la grève pour interpeller l’Etat.
Source:aa.com.tr