Thierry Venty: notre priorité à Madagascar, la prévention des catastrophes naturelles
24/01/2016 |
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Le nord-ouest de Madagascar est sous les eaux après des pluies abondantes. Le bilan encore provisoire des autorités fait état de trois personnes tuées et près de 3 400 sinistrées. Mais l’épreuve n’est pas terminée pour la Grande-île, car des inondations menacent d’autres régions, y compris la capitale, Antananarivo, en ce début de la saison des pluies. L’invité de Cap Océan Indien, ce dimanche 24 janvier est Thierry Venty, il est le secrétaire exécutif du Bureau national de gestion des risques et catastrophes (BNGRC). Il est au micro d’Aabla Jounaïdi.
RFI: Quel est le dernier bilan des inondations dans les régions de Boeny et Sofia, au nord de la Grande Île ?
Thierry Venty: Le dernier bilan fait quand même état d’un peu plus de 3 000 sinistrés, d’à peu près 400 cases détruites et de trois morts. Actuellement, il y a une certaine décrue mais l’eau est restée à un certain niveau qui empêche la circulation sur la RN6.
Quelle est la réponse des autorités locales ainsi que des autorités centrales de Madagascar face à ces dégâts matériels très importants ?
Les gens qui étaient dans les communes ont fait une prise en charge exceptionnelle de la situation et ils ont pu, malgré tout, éviter des catastrophes vu que la pluie est arrivée à 4h00 du matin. C’était donc une bonne prise en charge, ce qui montre une certaine maturité des autorités par rapport à la manière de faire face à ce genre de catastrophe. Le président de la République vient de faire sa visite, de remettre de la nourriture et de conforter le peuple qui est, par ailleurs, dans un état de blocage, en termes de circulation.
Il y a des rizières qui ont été complètement ensevelies sous le sable. Mais je vois que la population est prête à reprendre le travail et à se relever par rapport à cette crue.
D’après les prévisions météo qu’on a entre les mains, la saison des pluies s’annonce très, très pluvieuse. Nous, de notre côté, on se prépare déjà à avoir, aussi bien dans la capitale que dans les autres provinces de l’île, ce genre de crue et on se prépare donc d’ores et déjà à tout ça. Nous voulons faire, de la prévention, notre cheval de bataille. Nous voulons faire de la formation auprès des communautés par rapport aux risques de catastrophe. Il y a beaucoup de villages et beaucoup de villes qui ont déjà une certaine capacité à le faire et qui ont pu résister, depuis des années, voire des décennies, à des catastrophes naturelles parce qu’ils maîtrisent et savent comment faire face aux aléas qui les touchent habituellement. Nous essayons donc de capitaliser tout cela.
Et c’est ce qui s’est passé également à Boeny et Sofia. Les gens étaient formés pour réagir dans l’urgence ?
Comme vous l’avez dit.
Mais quelle réponse humanitaire et sanitaire pour les plus de 3 920 sinistrés, selon les chiffres que vous donniez, à cause des inondations. Quelle est la réponse pour ces gens-là ?
Les gens sinistrés ont été admis dans des endroits sécurisés et on s’occupe de leur donner de la nourriture et des consultations médicales. On vient même de solliciter nos partenaires locaux. La Croix-Rouge et Médecins sans frontières sont sur place pour donner les soins nécessaires à ces gens-là. Il y a le soutien moral et il y a le soutien en termes de logistique. On a mis en place des tentes aussi.
Vous décrivez une situation d’urgence, une réaction qui correspond qui est une réaction d’urgence. Or, cela fait des années que tous les ans, on a ces inondations. Pourquoi est-ce que l’Etat n’entame pas de vrais travaux d’infrastructures qui pourraient éviter à ces digues de lâcher aussi facilement ?
Effectivement, depuis quelques années, on a toujours des crues qu’on n’arrive pas à maîtriser dans cette partie de l’île et qui détruisent les infrastructures locales, les ponts, les maisons et tout cela. Je pense que c’est dû vraiment à un changement climatique. Quand on essaie de colmater un point une année, elles arrivent à trouver d’autres issues l’année d’après.
La deuxième chose, c’est que Madagascar est un pays qui essaie de se relever et pour renouveler toutes ses infrastructures, il y a beaucoup à faire. Après cinq ans de crise politico-économique à Madagascar, c’est maintenant que l’Etat commence à avoir une certaine coudée franche pour entamer les réformes nécessaires et entrer dans une autre phase de croissance. Le président veut vraiment prendre en main cette situation et essayer de résorber cette escalade en termes de catastrophes naturelles à Madagascar.
Donc il y a une volonté politique. Mais est-ce que les moyens suivent derrière ?
Nous espérons que les pays amis puissent nous aider aussi, derrière, parce qu’il y a une compréhension mutuelle. Sur RFI, vous savez que la France et Madagascar sont deux pays dont l’histoire est liée très étroitement. Je pense que la France connaît bien la situation à Madagascar et je ne serais pas étonné qu’il y ait un partenariat qui se mette en place et que nos deux gouvernements puissent travailler de concert pour aller de l’avant. La coopération régionale va également jouer. Ces derniers temps, Madagascar a vraiment ouvert ses frontières à des pays amis qui commencent donc à tisser des relations politico-commerciales et diplomatiques avec le pays, ce qui aura une retombée positive dans les prochaines années.
Source: Aabla Jounaïdi - rfi.fr